Interview de Philippe Pierre
et Xavier Lacaze, deux hommes d’entreprise qui n’hésitent pas à
dépasser le « cadre traditionnel » pour enseigner ou produire de la
recherche en sciences sociales.
Tout au long de la semaine nous vous avons donné leurs réponses à un entretien croisé qui vise à dissocier deux démarches professionnelles, celles de coach et de formateur aux frontières parfois ténues. Voici la dernière des trois questions, donc, inspirées par deux traditions, celle de la psychologie et celle de la sociologie appliquées au monde du travail et de l’entreprise.
3/ Développement personnel et monde entrepreneurial
Xavier LACAZE, quelle place donnez-vous au développement personnel en tant qu’homme d’entreprise et coach ?
(...)
Philippe PIERRE, quelle place donnez-vous au développement personnel en tant qu’homme d’entreprise et sociologue ?
(...)
Conclusion de Xavier Lacaze :
(...)
3/ Développement personnel et monde entrepreneurial
Xavier LACAZE, quelle place donnez-vous au développement personnel en tant qu’homme d’entreprise et coach ?
Les relations humaines sont présentes à des degrés divers dans tous les
métiers. Au delà des acquis, les postes, notamment de managers, font la
part belle à l’intuition, à l’inné, à l’expérience, à l’apprentissage
par « essai - erreur – correction ».
L’individu, au fil de sa carrière, devient son propre outil de travail,
et c’est en ce sens que le développement personnel rejoint le
développement professionnel.
Les outils contemporains de la GRH (assessment center, 360°…) et les
grilles d’évaluation s’attachent de plus en plus aux comportements
(capacité à influer, à négocier, à travailler en réseau, à développer
les compétences de ses collaborateurs…). Dans ce contexte, le savoir
être et l’identité professionnelle prennent toute leur place.
Le développement personnel ne doit pas être associé à une
psychologisation de l’entreprise, mais plutôt à un complément
indispensable pour prendre du recul, agir avec ses émotions, identifier
sa posture, gagner en confort, développer de la puissance.
Les formateurs, consultants, coaches qui bénéficient d’une double
expérience (homme d’entreprise et spécialiste de la relation),
présentent un intérêt pour allier les contraintes économiques de
l’entreprise et la dimension sociale de cette dernière. Quant au
développement personnel du coach, il passe bien sûr par son expérience
professionnelle mais de vie aussi. Il est pour cela au moins accompagné
par son superviseur, et pour la plupart par un travail de thérapie.
Philippe PIERRE, quelle place donnez-vous au développement personnel en tant qu’homme d’entreprise et sociologue ?
Le sociologue est celui qui dénonce les ordres établis et pèse les
rapports de domination. Il lui appartient de s’interroger sur ce que
Xavier LACAZE a appelé les risques de psychologisation ou encore d’un
coaching qui serait tentative de manipulation.
Le coaching vise à aider quelqu'un à se débrouiller tout seul. Beau
paradoxe puisque la personne est appelée à élaborer elle -même sa
solution. Tout ce concentre sur le moment ou plutôt les moments
successifs, inattendus, d’une élaboration endogène et non de solutions
venues de l'extérieur. Dans la thérapie, on va se centrer sur le passé,
sur l'inconscient. Dans le coaching, je comprends que seront favorisées
les dimensions présentes de l’action même si le philosophe nous apprend
qu’il y a un présent du passé, un présent du présent et un présent du
futur.
A un niveau individuel, le coaching m’apparaît utile lors d’une prise
d'un nouveau poste, une situation de négociation avec une entreprise ou
un nouveau patron, un outplacement, une présentation en public, une
réflexion sur les objectifs, la gestion de son stress, de son temps, de
ses motivations... Le coaching offre un espace de réflexion, de
feed-back, d'élaboration de scénarios, de balayage des angles morts
pour reprendre l'expression de V. LENHARDT.
Si je dénonce certains risques liés à une volonté d’hyper-contrôle,
il n’en reste pas moins que le coaching peut répondre à une vraie
utilité en entreprise. Prenons l’exemple de ces sportifs de haut
niveau, avant le match, qui ont un temps de préparation puis de
récupération. Pourquoi les dirigeants et la plupart des managers, pour
ne prendre que le haut de la pyramide sociale, marchent-ils en continu ?
En sport, les entraîneurs, les coaches tracent tout au long de la
saison des courbes de performances, tant il est vrai que cette dernière
n’est pas linéaire. Durant les matchs, la gestion des temps forts comme
des temps faibles influencent la performance. Le développement
personnel, c’est peut être la clef de la performance durable ! Si la
sieste pour un sportif de haut niveau fait partie de l’entraînement, le
développement personnel pour un dirigeant fait peut être partie de sa
performance !
Xavier Lacaze :
La formation et l’analyse des pratiques se complètent dans les cursus de professionnalisation : à l’image du rapport entre Platon et Socrate, le premier défend le transfert de savoirs et le deuxième est davantage un chercheur de sens. L’homme peut ainsi avancer sur ses deux jambes, une autour des comportements et des compétences (« le faire »), l’autre autour de son identité professionnelle (« l’être »). L’individu a besoin de capitaliser sur ses savoirs pour se développer, et en même temps d’espace de non savoir (posture difficile à tenir pour un formateur) pour permettre l’émergence de nouvelles compétences.
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