"Diversité : les nouvelles méthodes de recrutement"
En effet, la signature de la Charte de la diversité dans l’entreprise a été un premier pas. Les entreprises doivent maintenant passer de l’étape de communication et de sensibilisation, à celle du recrutement de profils différents, en termes d’âge, de sexe, de niveau de formation, de nationalités, d’origines ethniques... Pour se faire, elles s’intéressent aujourd’hui aux nouvelles méthodes de recrutement et à une réactualisation de leurs formations de recruteurs RH et opérationnels.
Présidée par Jean-Marie Peretti, cette conférence était animée par des intervenants de qualité:
• Anne SAÜT, créatrice et dirigeante du Cabinet de Conseil RH, Diversity Conseil, auteur d’une thèse ESSEC sur la Diversité et les performances en entreprise.
• Christian DESLANDES, Groupe AIR FRANCE, Chargé de la Responsabilité Sociale
• Deborah ETIENNE, Groupe L’OREAL, Responsable Recrutement DPL
• Alexandre PHILIPPE, Groupe CYBORG, Directeur Commercial
Axée d‘abord sur les témoignages des entreprises représentées, puis sur l’expertise d’Anne Saüt, cette conférence apporte une réflexion sur les défis de la diversité du point de vue du recrutement. Le public composé d’une centaine de professionnels RH et d’opérationnels a poursuivi l’analyse à travers un échange de questions et d’expériences. Ce débat est reporté en fin de note.
Retrouvez la totalité du compte-rendu en cliquant ici :Téléchargement cr_recrutement_et_diversite.pdf
Organisation du comte-rendu "Diversité : les nouvelles méthodes de recrutement"
- Témoignage de Christian DESLANDES du Groupe Air France :
- Témoignage de Déborah Etienne de L’Oréal
- Témoignage d’Alexandre Philippe de la PME Cyborg:
- Synthèse d’Anne Saüt : Comment recruter différemment ? (les techniques, les formations)
DEBAT AVEC LE PUBLIC :
Une personne du public revient sur la politique des stages chez L’Oréal, en demandant à Deborah Etienne si ce sont les opérationnels qui recrutent leurs stagiaires, et si oui, comment s’intègre la diversité dans leur choix ?
Elle répond que le recrutement, même celui des stagiaires, est centralisé par les fonctions RH qui ne proposent qu’un à trois profils aux opérationnels. Ensuite, pour susciter leur enthousiasme face aux candidats de la diversité, elle s’attache à leur montrer qu’il y a des exemples réussis au quotidien. Selon elle, c’est un travail de conviction.
Une personne du public est gênée par les différentes méthodes de recrutement exposées qui poussent à embaucher des gens par « ghetto ». Selon lui, le problème de la diversité se pose moins quand on réunit plusieurs jeunes de Trappe que quand un handicapé noir se présente dans un forum « normal ». Il regrette que les actions volontaristes remplacent progressivement les forums classiques.
Quelqu’un l’interpelle en rappelant que l’entreprise n’est pas là pour éduquer la société.
Anne Saüt, s’interroge sur la bonne démarche pour « se vendre ». Il peut y avoir des choix stratégiques de présentation pour les candidats. Elle pense, par exemple, à une personne porteuse d’une maladie qui peut se déclencher dans dix ans, dont le handicap ne se voit pas aujourd’hui. Doit-elle le mentionner sur son CV et être alors considérée comme candidate Cotorep ou pas ? Comment sinon pourra-t-elle expliquer à son futur employeur qu’elle ne veut pas faire des horaires à rallonge, etc..
Aujourd’hui, nous restons dans le système du clonage : comment passer cette barrière avant l’entretien, c’est-à-dire au niveau du CV, puisque 80% des recrutements se font via le net.
Anne Saüt répond que le CV anonyme peut être une solution. Dans certains cas, même les diplômes n’y apparaissent pas. Elle croit aussi beaucoup aux Salons, et aux Assessment Centers, où l’on considère moins le CV.
Une DRH du public ajoute que, selon elle, la pénurie de cadres va casser le clonage qu’elle avoue réaliser depuis 30 ans. Les recruteurs vont êtres forcés de retrouver de vrais outils de sélection.
Alors que l’on doit parler de compétences pour un recrutement, le terme de « minorités visibles » choque.
Anne Saüt répond que l’on a beaucoup recruté sur le diplôme et moins sur les compétences (Enarques dans beaucoup de hauts postes de façon systématique..).
Déborah Etienne ajoute qu’en Grande-Bretagne, on n’hésite pas à compter les minorités visibles dans les entreprises. Cela rappelle le système de quotas aux Etats-Unis.
Quelqu’un du public a pu écouter un DRH qui avait signé la Charte de la diversité, décrire brièvement les mille derniers cadres recrutés par son entreprise. Il y en avait seulement quatre de plus de 50 ans. Ce DRH n’a pas su lui dire si ces gens étaient au chômage ou déjà en poste.
Est-ce un handicap aujourd’hui d’être au chômage ? De fait, on embauche beaucoup plus de personnes déjà en poste…
Comment peut-on mesurer la diversité puisqu’il y a une loi en France qui interdit de compter les gens par origine ?
Deborah Etienne répond que c’est effectivement difficile pour elle de ne pas pouvoir mesurer l’impact de ces actions en faveur de la diversité.
Une personne issue d’une minorité visible relate qu’en Angleterre Ikea avait été attaquée et jugée car l’entreprise n’employait aucune minorité visible. En revanche, elle dit être la première choquée de voir des employés en turban sur leur lieu de travail à Londres…
Jean-Marie Peretti conclut la conférence en rappelant qu’une table ronde sur la diversité aura lieu à l’ESSEC à Cergy le 23 janvier 2007 pour continuer ces débats.
(contact Geneviève Burke : [email protected] )
Poursuivez les échanges sur ce thème en laissant vos questions et remarques dans la case "commentaires" ci-dessous.
Au-delà de la prise de conscience des entreprises qui est nécessaire, c’est une prise de conscience sociétale qui doit émerger. La diversité est humaine et universelle en ce sens que nous sommes tous le produit d’une diversité parce que nous sommes dans l’ère de la mobilité dans un système ouvert qui vit et réagit sur des cycles de vie de plus en plus court.
C’est l’acceptation de la différence, du changement, de la remise en question de nos pratiques et de nos représentations cérébrales dans nos processus de prise de décision et nos méthodes de travail qui apporteront de la richesse dans nos organisations.
Certes le premier pas de la prise de conscience se devait être une politique volontariste.
L’information et la diffusion de supports de communication, la formation/sensibilisation se devaient être une suite logique à la décision politique.
Toutefois, je remarque que les dirigeants et les managers sont en attente d’un outil miracle de comptabilisation pour répondre à une problématique de valeur.
A mon sens, la diversité est mesurable dans nos processus et dans nos résultats non dans l’identification quantitative comme nous avons pu le faire dans la recherche d’égalité homme-femme.
La diversité dans le recrutement passe par exemple par l’acceptation des parcours atypiques (une constance de nos jours). Dans ce domaine la RH doit pouvoir œuvrer en son sein en priorité, exemple : je connais la DRH d’un grand groupe français qui ne recrute en son sein que des personnes diplômées de la même école. C’est effectivement rassurant et plus facile de recruter et de travailler avec des profils issus d’une formation identifiée comme performante ; mais comment ces mêmes personnes peuvent elles à la fois désirer de la diversité dans leurs recrutements en étant issues de la même école de pensée ?!
La mesure de la diversité passe par la valorisation de la différence dans l’élaboration des fiches de profil, dans les processus de recrutement et de mobilité interne. Par exemple, j’entends souvent que l’on voudrait demander aux candidats d’indiquer dans leur dossier de candidature leur appartenance « raciale » pour permettre à la RH de comptabiliser et gérer ses quotas comme pour l’handicap et la parité homme/femme. Cela revient à demander à un individu d’identifier dans ce qui le définit en tant qu’être humain ce qui est le plus discriminatoire pour lui !!! C’est totalement contraire à la valorisation de la différence.
Pour aller dans la caricature : une métisse de 24 ans diplômée d’une école non répertoriée dans le guiness des meilleurs écoles, de mère sans travail, noire, de confession musulmane et, de père, de type asiatique, en intérim, de confession juive résidant dans un quartier sensible….Alors qu’elle vit dans la diversité et l’acceptation des différences pour trouver une unicité on va lui demander de pointer du doigt le facteur le plus discriminant de son être pour pouvoir travailler ???
Le talent, la performance et la créativité se trouvent dans la diversité.
La diversité doit s’appliquer non pas parce qu’elle obligatoire (quota/amende/ redevance libératoire…) mais par ce qu’elle est vitale pour les entreprises et inhérente à notre société.
Rédigé par : BRAHIMI Fadhila | 10 février 2007 à 07:20